Shantideva’s
Bodhicharyāvatāra
བྱང་ཆུབ་སེམས་པའི་སྤྱོད་པ་ལ་འཇུག་པ།།
Groupe d'Etude guidé par Vén. Lama Sangyay Tendzin
Session 67 – Samedi, 4 mars 2023
Chapitre SEPT : L’effort Joyeux - Le Support de la Pratique
REFUGE | MANDALA | REQUETE des ENSEIGNEMENTS
Invocation par le Lama de l’assemblée des Bouddhas et des détenteurs de Lignée.
Courte pratique de Quiétude Mentale – Développement de la Bodhicitta
Parmi les quatre forces que nous devons mobiliser pour mettre en place les conditions favorables à la diligence, nous étudions actuellement la seconde, la force de constance.
Après nous avoir fourni une explication générale de cette force à travers les strophes 47 à 49, Shantideva donne une explication détaillée de trois points spécifiques.
La semaine dernière, nous avons parcouru le premier d'entre eux,
1. Cultiver un sentiment de confiance en soi par rapport à la tâche (versets 50-51).
Les huit strophes suivantes nous fournissent une explication détaillée du deuxième point,
2. Cultiver un sentiment de confiance en soi vis-à-vis de ses capacités (versets 52 à 59).
Shantideva présente ensuite le troisième point,
3. Cultiver un sentiment de confiance en soi vis-à-vis des émotions afflictives (versets 60 à 62).
Strophe 60 :
Cerné par les émotions négatives,
Je leur résisterai mille fois plus.
Tel un lion parmi les renards,
Je ne laisserai pas leur foule me nuire !
En compagnie de personnes attirantes, le désir naît ; en présence de gens difficiles, la haine se développe. En général, que l’on s’expose à des situations agressives ou à des stimulations plaisantes, cela nous cause des émotions conflictuelles auxquelles il faut résister autant que possible en cultivant sans relâche leurs antidotes.
Par exemple, tout comme un lion ne peut être blessé par un renard, nous devons garantir que notre esprit soit immunisé contre l'incursion des émotions conflictuelles.
Ainsi, les pratiquants moyens doivent appliquer les antidotes et tenir bon.
En revanche, les praticiens d'une capacité plus élémentaire doivent tout faire pour éviter ces conflits et se retirer.
Quant aux pratiquants supérieurs, l'objet même qui donne lieu à leurs afflictions, dicte leur chemin.
Strophe 61 :
Lorsqu’un grand péril menace,
L’homme se protège les yeux.
Même exposé aux dangers,
Je ne céderai pas aux émotions négatives !
Aussi difficiles que soient les circonstances dans lesquelles ils se trouvent, même lorsque leur vie est menacée, les gens se protègent instinctivement les yeux, leur bien le plus cher.
De même, quels que soient les dangers, nous devons nous prémunir contre la perte de contrôle sur les afflictions du désir et de la haine. Nous en sommes tellement dépendants qu'il faut beaucoup de force et de détermination pour ne pas en être victimes.
Strophe 62 :
Plutôt mourir dans les flammes ou la tête coupée
Que jamais m’incliner devant les émotions négatives, mes ennemies !
De même, en toutes circonstances,
Je ne ferai que ce qui est juste.
Par conséquent, dit Shantideva, qu'il soit brûlé à mort ou décapité par une épée (dont la soudaineté est une souffrance courte et donc moindre), dans tous les cas, il ne se permettra jamais de s’incliner et n’aura de cesse de combattre ses ennemis, les émotions conflictuelles.
Dès le départ, il prend l'engagement sincère et résolu de ne jamais se laisser contaminer par la souillure. N'importe où, n'importe quand, proclame-t-il, il n'agira que correctement, et jamais d'une manière inappropriée.
Cette strophe conclut l'explication détaillée sur la deuxième force, la force de constance.
Shantideva poursuit en nous donnant une brève présentation des deux forces restantes, la force de la joie (versets 63 à 66) et la force de l'abandon (verset 67). Tout d’abord, la force de la Joie.
Strophe 63 :
À l’image de ceux qui aiment jouer,
Quoi que je fasse,
Je m’y attacherai et,
Jamais rassasié, j’y prendrai plaisir.
Tout comme les jeunes enfants prennent plaisir à leurs jeux sans s’attendre à une récompense pour ce qu'ils font, ni alors ni dans la vie à venir. Ils ne recherchent que le simple plaisir de jouer et ne s’en lassent jamais.
C'est ainsi que les bodhisattvas doivent se comporter dans tout ce qu'ils font pour le bien d’autrui, en accomplissant des actes de générosité, de discipline ou des autres vertus sans s’attendre à la moindre récompense pour ce qu'ils font.
En effet, ils devraient se consacrer à leurs tâches avec une ardeur toujours plus grande. Ils ne devraient jamais être satisfaits mais éprouver toujours plus de plaisir dans leurs actions.
Strophe 64 :
En vue du bonheur, on accomplit des actes
Dont on n’est pas sûr qu’ils rendent heureux,
Mais comment être heureux si l’on ne connaît pas
Ce qui procure le bonheur ?
Dans leur effort pour atteindre plaisir et contentement, les gens du monde s'efforcent vigoureusement dans leurs activités professionnelles. Pourtant, le succès de tels démarches est en fait imprévisible.
Comment peut-on atteindre le bonheur en agissant de façon impure ou malsaine ?
Comment peut-on dès lors réussir si l'on n’est pas capable d’accomplir les actions vertueuses des bodhisattvas, telle la générosité, la discipline, etc., dont découle le bonheur ?
Leur destin est leur malheur dans cette vie et dans leurs vies futures.
Strophe 65 :
Si les plaisirs qui sont comme du miel
Sur le fil d’un rasoir ne me suffisent jamais,
Comment me rassasierai-je des mérites
Qui ont pour fruit le bonheur et la paix ?
Il y a peu de profit et même un grand danger dans la jouissance des cinq objets sensuels (གཟུགས་ - 'zug'- སྒྲ་ - 'dra'- དྲི་ - 'dri'- རོ་ - 'ro' - རེག - 'reg', formes, sons, scents etc.).
En effet, c'est comme lécher du miel sur le tranchant d'un rasoir extrêmement tranchant.
Nous sommes attachés au plaisir éphémère qui naît de la rencontre d'un objet et de sa conscience associée. Nous aspirons à un tel plaisir et voulons qu'il se répète encore et encore. C'est comme boire de l'eau salée : nous ne pourrons jamais étancher notre soif.
Alors que notre recherche du plaisir est sans fin, comment pouvons-nous donc nous lasser des actes vertueux du Bodhisattva ? Ceux-ci sont en effet comme le nectar, sont bénéfiques et paisibles.
Ils nous font accumuler du mérite et de la sagesse, conduisant à l'effet pleinement mûri du bonheur dans les royaumes humains et célestes et vers le résultat ultime de la bouddhéité, c'est-à-dire l'état de paix libre de toute souffrance.
De cette façon, notre désir de vertu ne devrait jamais cesser tant que nous ne sommes pleinement satisfaits.
Strophe 66 :
Aussi, pour mener ma tâche
Jusqu’à son terme, je l’entreprendrai
Comme l’éléphant qui, tourmenté par le soleil de midi,
Entre dans les eaux d’un lac.
Par conséquent, alors que nous voulons accomplir n'importe quelle des activités du bodhisattva, nous devons être comme des éléphants sous le soleil d'été de midi, tourmentés par la chaleur et la soif, ils aperçoivent un la fraicheur d’un plan d’eau : sans hésiter le moindre instant, ils s’y jettent avec le plus grand plaisir.
De la même façon, pour notre bien et celui d’autrui, engageons-nous joyeusement dans la pratique de la générosité et des vertus similaires.
Ceci complète l'explication donnée par Shantideva sur la force de la Joie.
Vient ensuite le commentaire sur la quatrième force, la force du renoncement.
Strophe 67 :
S’il se trouve que les forces me manquent,
J’abandonnerai pour reprendre plus tard.
Et lorsque j’aurai fini un travail, je m’en détacherai
Avec le désir d’en accomplir un autre, et un autre encore.
Si nos forces sont diminuées par la faiblesse, l'épuisement ou la maladie, et que nous sommes incapables d'accomplir une activité, nous devons nous résoudre à la mettre de côté momentanément, pour mieux la reprendre ensuite.
Et lorsque la tâche que nous avons engagée touche à sa fin, nous ne devons pas nous reposer sur nos réalisations en pensant que nous en avons assez fait. Au lieu de cela, nous devons passer à autre chose, quitter toutes les tâches qui ont été accomplies et souhaiter avec impatience faire des choses encore plus grandes.
A part cette brève explication, il n'y a pas d'autre commentaire fait par Shantideva sur ce point.
Par ailleurs, Shantideva va maintenant s’attarder sur deux applications qu’il nous faut parfaire en pratiquant les quatre forces que nous venons d’étudier, lesquelles facilitent le déploiement de la diligence :
- Parfaire une pratique sérieuse et,
- Parfaire son contrôle du corps, de la parole et de l'esprit.
Parfaire une pratique sérieuse est décrit dans les sept strophes suivantes. (Versets 68–74)
Strophe 68 :
Comme un combattant aguerri,
Quand les lames seront tirées au clair,
J’esquiverai les armes des émotions négatives
Et pulvériserai les poisons ennemis !
En ce qui concerne la pratique sérieuse de la prudence, il en va de même lorsque des combattants chevronnés, affrontant leurs ennemis sur la ligne de front, sont habiles à éviter le tranchant de leurs épées et finissent par les renverser.
De la même manière, nous devons échapper aux armes tranchantes de nos ennemis, les souillures. Nous devons vaincre et détourner ces ennemis afin qu'ils soient rendus inoffensifs.
Strophe 69 :
Celui dont l’épée tombe pendant le combat,
De peur aussitôt la ramasse.
De même, si l’arme de mon attention m’échappe,
Je m’en ressaisirai vite par crainte des enfers !
En ce qui concerne la pratique sérieuse de la pleine conscience, c'est comme lorsqu'un soldat laisse tomber son épée au combat. Il la récupère rapidement de peur d'être tué.
De la même manière, si nous sommes emportés par la distraction ou simplement ayant relâché notre attention et perdu l'arme de la pleine conscience, en d'autres termes, si nous oublions d'appliquer l'antidote, nous devons rapidement la récupérer et nous efforcer de le mettre en œuvre, ressentant la peur de tomber sous le pouvoir des afflictions et le destin qui s'ensuit de tomber dans les royaumes de l'enfer.
Strophe 70 :
Dès qu’elles en trouvent l’occasion,
Les fautes envahissent l’esprit,
Comme le poison se répand dans le corps
Par la voie du sang.
Lorsqu'on est atteint par une flèche empoisonnée, le venin, transporté par le sang, s'infiltre dans le corps avec son effet létal.
De la même manière, lorsque nous sommes distraits par les objets des sens et qu'une affliction minime se manifeste en nous, d’autres émotions conflictuelles plus grandes peuvent se répandre dans l'esprit et y dévaster le principe vital des mondes supérieurs.
C'est assez pour aujourd'hui. Pratiquons la quiétude mentale pendant un court moment, avant de consacrer notre mérite au profit de tous.

